Le chapitre dix-sept aborde un sujet délicat sur le plan de sa compréhension et de son interprétation.
Qui est donc cette « grande prostituée » ?
Une première indication nous est donnée lorsque Jean nous révèle un nom :
« Sur son front un nom était écrit, un mystère : Babylone la grande, la mère des prostituées et des abominations de la terre. » (verset 5)
Ce nom est un mystère puisque Babylone n'existait pratiquement plus au temps de Jean.
Mais cette appellation symbolique trouve son explication dans une précédente étude sur "Babylone la grande" (Apocalypse 14.8).
Babylone n'est autre que Rome.
Babylone est qualifiée de « mère des prostituées et des abominations de la terre » car elle a notamment connu une pratique dénoncée dans l'Ancien Testament : la "prostitution sacrée".
« Il n'y aura aucune prostituée parmi les filles d'Israël, ni aucun prostitué parmi les fils d'Israël.
Tu n'apporteras pas dans la maison de l'Eternel, ton Dieu, pour l'accomplissement d'un vœu, le salaire d'une prostituée ... »
(Deutéronome 23.18-19)
La prostitution sacrée consistait donc à honorer la divinité en versant au temple le salaire de la prostitution.
Cette pratique en vigueur à Babylone est confirmée par l'historien grec Hérodote qui vécut au Ve siècle avant Jésus Christ :
"Lorsqu'une femme est assise là, elle doit attendre pour retourner chez elle qu'un étranger lui ait jeté de l'argent sur les genoux et se soit uni à elle à l'intérieur du temple (...).
Lorsqu'elle s'est unie à l'homme, elle a acquitté son devoir à l'égard de la déesse et peut revenir chez elle ..."
Ainsi, les prêtres de ce temple païen pouvaient vivre du fruit de la prostitution des fidèles, transformant ainsi le temple en une "maison de passe".
Israël avait été aussi contaminé jusqu'au Temple de Jérusalem et le roi Josias était intervenu vigoureusement au VIIe siècle avant Jésus Christ :
« Il démolit les logements des prostitués qui se trouvaient dans la maison de l'Eternel et où les femmes tissaient des toiles pour Astarté. » (2 Rois 23.7)
Malgré cette remise en ordre de la part de Josias, le peuple de Juda n'a pu échapper à la déportation en Babylone, comme le Seigneur nous le rappelle par ce verset :
« Quand je les aurai répandus parmi les peuples, et qu’ils se souviendront de moi dans les pays lointains, ils vivront avec leurs enfants et ils reviendront. » (Zacharie 10.9)
Par extension, c'est toute forme d'idolâtrie détournant le peuple élu du seul vrai Dieu, qu'il y ait ou non un commerce sexuel, qui fut qualifiée de prostitution ...
« En effet, le pays se prostitue, il abandonne l'Eternel. » (Osée 1.2)
A l'époque de Jean, lors de la rédaction du Livre de l'Apocalypse, c'est aussi en ce sens que le terme de prostitution est employé, notamment quand il évoque les dérives idolâtres de "l'Eglise de Thyatire" :
« Mais j’ai contre toi de tolérer Jézabel, cette femme qui se prétend prophétesse, dont l'enseignement égare mes serviteurs pour qu'ils se prostituent et mangent des viandes sacrifiées aux idoles. » (Apocalypse 2.20)
Sous l'empire romain, la pratique de la "prostitution sacrée" dans les édifices religieux n'est pas signalée.
Car la "prostitution sacrée" a évolué en trouvant d'autres modes opératoires, d'autres pratiques, l'idolâtrie a trouvé d'autres voies comme nous le révèle "la femme dans le désert ..."